Dire non à la corruption pour endiguer l’extrémisme

4 mai 2018

 

De plus en plus de recherches tendent à mettre en avant un lien entre corruption et extrémisme violent. Si ces études doivent encore être approfondies, il est déjà possible d’argumenter que la corruption est à la fois une cause et une conséquence d’un déficit de gouvernance et peut créer ou nourrir les conditions nécessaires à la montée de la radicalisation.   

Des preuves apportées par Transparency International (en anglais) montrent que les pays les moins bien classés dans l’Indice de perception de la corruption (CPI) sont souvent ceux en situation de conflit ou de guerre.  

Par ailleurs, de plus en plus de voix s’élèvent pour reconnaitre que la corruption fait partie d’un ensemble d’éléments multidimensionnels à l’origine de l’extrémisme violent. Le Plan d’action pour la prévention de l’extrémisme violent du Secrétaire général des Nations Unies suggère que les pays ne parvenant pas à contrôler leur niveau de corruption (parmi d’autres indicateurs tels que la pauvreté, le chômage, la gestion de la diversité en accord avec les droits de l’Homme), ont plus de chance de voir une montée d’extrémisme violent.  

Les 6 pays les moins bien classés au CPI - la Somalie, le Soudan du Sud, la Syrie, l’Afghanistan, le Yémen et la Libye - font tous face à d’intenses conflits, y compris ceux caractérisés par l’extrémisme violent et le terrorisme. Si l'interprétation de tels indices présente des limites, et ne prouve pas nécessairement une relation causale entre corruption et terrorisme ou inversément, les deux observations suivantes s'imposent.  

Tout d’abord, des institutions étatiques telles que la justice, la sécurité, et les secteurs socio-économiques sont les plus vulnérables à la corruption. Une fois corrompues, ces institutions n'ont plus qu'une capacité limitée à combattre ou à empêcher l’extrémisme violent. Les actes de corruption ont souvent le plus d’impact sur les groupes les plus pauvres et les plus vulnérables de la société, en particulier les jeunes, les femmes, les enfants, les populations autochtones et les personnes handicapées. Par conséquent, les sentiments d’injustice, d’iniquité et d’impuissance ressentis par ces groupes fournissent un environnement propice au développement de l’extrémisme violent.  

De plus, des pratiques de corruption par des dirigeants politiques à l’échelle internationale et nationale offrent une légitimité à l’extrémisme religieux, justifiant l'idéologie et le recrutement de groupes vulnérables. Par exemple, l’ampleur de la corruption révélée par les Panama papers a alimenté les récits souvent utilisés par ISIS, Al Qaeda, Boko Haram et d’autres groupes terroristes sur l’intérêt patrimonial des élites politiques.   

Ce sont les Etats qui ont pour principale responsabilité de diminuer la corruption en tant qu’élément essentiel de la lutte contre l’extrémisme violent. La promotion d’un leadership efficace et un changement de mentalité au sein des élites politiques sont cruciaux, ainsi que la mise en place d'une justice impartiale, d’une législature et d'agences anti-corruption. Des médias indépendants et une société civile active offrent également un environnement propice à la lutte contre la corruption.  

Le soutien aux Etats et à la société civile par les organisations internationales et régionales participe à l’amélioration des normes internationales visant à la réduction de la corruption. Dans ce contexte, l’Agenda de développement à l'horizon 2030 offre un cadre important pour aider les pays à atteindre une plus grande transparence et une plus grande intégrité dans leur système de gouvernance.

L’anticorruption et la prévention de l’extrémisme violent sont en lien direct avec nos efforts de promotion d’un développement inclusif, de la tolérance et du respect de la diversité.  c'est pourquoi, depuis 2016, nous aidons les états à mettre en place des Plans d’Action nationaux sur l’extrémisme violent au travers de la recherche, du soutien politique et de nos interventions programmatiques.

D’autres acteurs, y compris des organisations régionales telles que l’Union africaine (UA), ont entamé des discussions politiques sur la lutte contre la corruption. Par exemple, le thème de l’UA en 2018 est Le Combat contre la Corruption : Une voie durable vers la transformation de l’Afrique. Il semble y avoir un consensus de plus en plus important autour des avantages de la lutte contre la corruption comme chemin vers une paix durable. C’est un signe encourageant !